MATHIEU KAHN A DISPARU
Seules trois personnes l'ont vu récemment.
Son frère. Son médecin. Un commerçant du coin.
Depuis, la police le cherche.

Détail important : Mathieu Kahn est aveugle.

ÉPISODE 1

 26/02/2021


 

DÉPOSITION MME MANON RIAULT – MÉDECIN GÉNÉRALISTE

 

Une lumière blanche s’allume. Complètement éblouis, je plisse les yeux et regarde autour de moi pour découvrir où l’on m’a amenée. Je suis assise sur une vieille chaise toute bancale devant une table tout aussi vieille. Le sol est carrelé de blanc tout comme les murs. En face de moi, il y a une grande vitre fumée.

« Bonjour Mme Riault, dit une voix masculine qui provient des haut-parleurs au-dessus de la vitre, je suis le commissaire Lacan. Je suis chargé de résoudre l’enquête de la disparition de Mr Mathieu Khane. Comme on a déjà pu vous l’expliquer, j’interroge toutes les personnes qui font partis de près ou de loin de la vie du disparu. Etant son médecin, vous en faites partie. Maintenant, si vous n’avez pas de question, j’aimerais savoir comment vous avez connu Mr Khane. 

— Oh vous savez, je ne m’en rappelle pas vraiment : cela remonte à si longtemps. Je ne vous apprends surement rien de nouveau, mais il est mon patient depuis presque une dizaine d’années. Avant moi, il était suivi par le docteur Lamartine qui a pris sa retraite et c’est donc moi qui l’ai remplacée. Maintenant, si je devais vous dire les circonstances exactes dans lesquelles nous nous sommes rencontrées, j’en serais incapable. Cela a dû avoir lieux dans mon bureau d’auscultation mais je ne me souviens pas de plus de détails, je m’en excuse. Enfin, j’ai tellement de patient donc si je devais me rappeler de tous leurs premiers rendez-vous je ne m’en sortirais pas.

— Bien, bien, je vois, reprend la voix, vous êtes sûre de ne rien vous rappeler de plus ? 

— Non, rien Mr le commissaire.

— J’ai une dernière question à vous poser : à quand remonte votre dernière consultation et pourquoi l’avez-vous vue ?

— Une semaine et trois jours avant sa disparition. A 14h50. Il m’avait appelé la veille car ses yeux lui faisaient mal, mais cela arrive régulièrement. Pour le soulager, je dois lui faire une piqure et j’ai donc été obligée de lui programmer un rendez-vous en urgence et de décaler la moitié de ceux qui étaient déjà prévus. Si bien que plusieurs de mes autres patients s’en sont plaints.

— Et comment était-il ? Avez-vous remarqué quelque chose d’anormal chez lui ?

— Outre sa cécité, vous voulez dire ? Eh bien, non. Bien sur ses yeux lui faisaient mal, comme je vous l’ai expliqué, donc il n’était pas au mieux de sa forme. Mais une fois que je lui ai administré son calmant, il s’est tout de suite senti beaucoup mieux et il est reparti. Comme d’habitude, sa femme était là dans la salle d’attente et ils sont rentrés chez eux, j’imagine. Je ne l’ai plus jamais revue.

— Vous êtes sûre, Madame Riault ? Rien de plus ?

— Écoutez, Monsieur le commissaire, je vous le dis et vous le redis : je n’ai rien remarqué d’étrange chez lui depuis des mois, c’est aussi simple que ça. Maintenant, j’aimerais retourner à mon cabinet où je serais vraiment utile contrairement à ici. Mes patients m’attendent et je ne peux me permettre de les faire patienter plus longtemps. Je vous souhaite une bonne journée, au revoir. »     

 

 

 

DÉPOSITION DE JULIEN GIOVANNI – VENDEUR À L’ÉPICERIE ROSTANG

— Comment avez-vous connu Mathieu Kahn, Monsieur Giovanni ?

— J’ai connu Mathieu grâce à mon épicerie. Il était un client fidèle, il venait tous les mardi, jeudi et samedi après-midi vers 18 heures pour acheter toutes sortes de produits comme des chips, des nouilles instantanées, des sodas ou encore de la salade. Je l’aimais bien. C’était une bonne personne. Mais il était quand même un peu froid avec moi ces derniers jours. J’avais l’impression qu’il ne m’appréciait plus trop, personnellement je le considérais vraiment comme un ami. On se parlait souvent de sujets divers comme de la semaine en cours ou de nos familles. C’était quelqu’un de très intéressant. Sa disparition m’affecte vraiment, il était pour moi un vrai ami sur qui je pouvais compter quand j’avais un problème. Il était vraiment bon.

            — Vous dites qu’il était devenu un peu froid avec vous ? C’est-à-dire ?

— Il semblait avoir des problèmes actuellement, je ne sais pas vraiment de quoi il s’agissait. Mais je pense que c’est plusieurs choses réunies qui l’ont mises dans cet état. Il m’avait dit qu’il avait eu des problèmes d’argents récemment. Il m’avait aussi dit, il y pas plus d’une semaine, qu’avec sa femme ils s’étaient fâchés comme jamais ils ne l’avaient fait. Il ne m’a cependant pas donné plus de détails sur cette dispute. Je pense aussi que ses problèmes financiers étaient dus à des défaites qu’il avait eu au jeu. Ses problèmes d’argent se sont ressentis, il achetait moins de choses dans mon épicerie, il ne me parlait plus trop, il souriait beaucoup moins qu’avant – déjà que ce n’était pas souvent. Il n’avait pas l’air d’être dans un mal-être profond mais plus dans une légère déprime. Il venait juste à l’épicerie pour acheter ce dont il avait besoin et repartait sans avoir dit aucun mot contrairement à d’habitude où il restait minimum 30 minutes pour discuter avec moi ou avec les autres clients. J’ai aussi remarqué qu’il avait commencé à fumer. Est-ce pour évacuer son stress ? En tout cas il ne se fournit pas chez moi.

 

 

DÉPOSITION DE NIKOLAS KAHN – FRÈRE DE MATHIEU KAHN

 

            — Mathieu Kahn est votre frère, c’est bien ça ?

— Oui. Enfin non, mon demi-frère. Car oui, on n’a pas le même père, maman ne sait pas que je suis au courant, mais Mathieu m’a tout raconté, il l’a appris un jour en écoutant une conversation de ma mère au téléphone. Mon père biologique était l’amant de ma mère, le meilleur ami de mon père. Mais apparemment, il est mort dans un accident de voiture peu de temps après ma naissance. Je connais cette histoire par cœur, papa nous la raconte chaque année depuis 16 ans, le jour de l’anniversaire de sa mort. D’ailleurs, je crois que mon père sait aussi que je ne suis pas son fils, ça doit être pour ça qu’il ne m’aime pas beaucoup. Mais bon, revenons à Mathieu. C’est donc mon grand frère. Petits, nous étions comme les deux doigts de la main, mais dès qu’il est entré au collège, ça n’a plus été pareil.

— Pourquoi ?

— Il a dû aller dans un collège spécial, pour aveugles et il ne rentrait que le weekend. A partir de ce moment, ma mère a commencé à boire et sortir beaucoup, elle n’avait plus son petit fils chéri à s’occuper, et moi, j’étais assez grand pour me débrouiller seul disait-elle. Quand Mathieu rentrait le weekend, on ne faisait que se croiser : il restait dans sa chambre en faisant ses devoirs et moi, j’allais chez notre voisin, Paul, pour jouer aux jeux vidéo et lire des romans d’enquêtes. Quand il est parti de la maison pour ses études, il ne revenait qu’une fois par mois, et à chaque fois, il ne restait que quelques jours. Notre relation n’est donc pas très fusionnelle, le seul chose qui nous unit vraiment, c’est notre mère. Mais bon elle, elle n’a d’yeux que pour lui.

— Diriez-vous que vous connaissez bien votre frère ?

— Moyen. Je ne connais pas ses passions, ni ce qu’il fait dans la vie, ni où il aime aller et la musique qu’il aime écouter. C’est mon frère mais en même temps c’est devenu un étranger. La seule chose que je sais de sa vie actuelle, c’est qu’il habite en ville, avec sa copine, et qu’il ne passe pas souvent nous voir, comme maman lui rabâche dès qu’elle l’a au téléphone.

— Qu’est ce qui vous a séparé ?

— Comme je l’ai dit avant, nous étions très proches petits, mais à son entrée au collège, ça a changé. On ne se voyait plus que les weekends, et il avait changé. Dans son collège, il était avec des élèves aveugles, comme lui et il avait enfin trouvé sa place, avec des gens qui le comprenait vraiment. Nous n’avions donc plus les mêmes centres d’intérêt et il passait de moins en moins de temps avec moi : je n’étais pas comme lui et je ne pouvais pas comprendre me répondait-il. Si Mathieu n’était pas allé en internat, dans ce collège, nous serions peut-être encore aussi proches qu’avant, ou en tout cas un peu plus qu’aujourd’hui.

 

 

 

FIN DU 1ER ÉPISODE

 

avec :

 

Le Dr Manon Riault – Ellyn Sarbach

Julien Giovanni – Marius Verguin

Nikolas Kahn – Alix Benhamou

 


ÉPISODE 2

 

Mathieu Kahn a disparu et personne, ni son médecin,

ni son frère, ni l’épicier du coin de la rue qui prétend être son ami

ne savent où il est.

Au commissariat, les interrogatoires

des deux principaux témoins se poursuivent…

 

 


 

APPEL TÉLÉPHONIQUE DU DR MANON RIAULT

 

J’entends le téléphone sonner à l’autre bout de la ligne, tout en regardant ma montre. Pourquoi met-il autant de temps à répondre ce fichu commissaire. Finalement, on décroche :

— Allo ?

Étonnant me dis-je, une voix de femme, ça doit être sa secrétaire

— Bonjour, je suis le docteur Riault. Il y a quelques heures le commissaire Lacan m’a posé des questions à propos de la disparition de Mr Kahn, mon patient qui a disparu. Malheureusement, je n’avais pas beaucoup de temps à lui accorder. Il m’avait donc donné son numéro pour que je puisse le rappeler si je me souvenais de quelque chose d’important. Il m’avait aussi demandé de réfléchir à la question suivante : le trouvais-je changé ou distant comme le supposait le frère du disparu ?

— Oui je vois, il m’en avait parlé, reprit la voix, je vous le passe tout de suite. 

 

Au bout d’un certain temps de silence, une voix, masculine cette fois-ci, se fit entendre au bout du fil.

— Merci de m’avoir appelé aussi vite, je sais que votre temps est précieux.

— Effectivement, c’est pour cela que je serais la plus brève possible.

— Je comprends. Bon, qu’avez-vous à me dire ?

— Deux choses. La première c’est la réponse à votre question : je n’ai rien remarqué à ce sujet à propos de mon patient. Mais je ne suis que son médecin, je n’entretiens donc pas de relations personnelles avec lui, je ne peux donc pas vous éclairez davantage. Il serait même inconvenant que je le connaisse outre mesure. La deuxième c’est que je me suis rappelée d’un moment qui me parait aujourd’hui quelque peu inhabituel. Un jour où je l’avais ausculté, ce n’était non pas sa femme qui l’attendait dans la salle d’attente comme à son habitude pour repartir, mais deux hommes plutôt costauds en imperméable gris, avec des lunettes de soleil noires sur leur nez et un chapeau melon de la même couleur que leur vêtement. Comme Mr Kahn est parti avec eux sans protester, je me suis dit que c’était surement d’autres membres de sa famille avec cependant des goûts assez douteux.

— Pourriez-vous me donner la date précise où cela s’est passé ?

— Il me semble que c’était environ une semaine et demie avant sa disparition.

— Bien. Je vous remercie de votre appel. J’ai cependant une question à vous poser si bien sûr vous avez encore un peu de temps.

— C’est votre jour de chance commissaire : mon prochain patient n’est que dans une heure.

— Parfait. Je voulais donc vous demander si vous sauriez si notre cher disparu se droguait ?

— Pardon ?

— Mathieu Kahn se droguait-il ?

— Je… eh bien c’est une sacrée question ça.

— Alors ?

— C’est bien indiscret de votre part de me demander ça, cher Monsieur.

— Écoutez-moi bien docteur Riault, indiscret ou pas je veux que vous me répondiez. C’est une question de vie ou de mort.

— Très bien, très bien, je vais vous répondre. Voilà, c’était il y a de cela quelque mois :  je lui ai fait sa prise de sang mensuelle et en l’analysant, j’ai trouvé non seulement de la nicotine qui coulait dans ses veines alors que depuis maintenant dix ans que je suis responsable de lui, je ne lui en avais jamais prélevé même ne serait-ce qu’un tout petit peu ; mais également une grande dose d’héroïne. Bien sûr cela me regarde pas, je ne lui en est jamais parlé.

— Combien de fois cela s’est produit ?

— Ça n’a jamais cessé à vrai dire. J’ai du travail à faire maintenant je me vois dans l’obligation de vous laisser. Bonne journée à vous Mr le commissaire.

— Attendez ! Ce n’est… 

N’écoutant pas sa question, je raccroche.

Pendant les minutes qui suivent, mon téléphone ne cesse de sonner. A bout de nerf, je décroche.

— Mais enfin, vous n’en avais pas marre de m’harceler ! Si je ne vous réponds pas c’est que je suis occupée !

— Docteur Riault, vous allez arrêter de jouer à ce petit jeu avec moi, j’en ai plus qu’assez de tous vos caprices. La vie d’un de vos précieux patients est en jeu, vous vous souvenez ? Maintenant, vous allez répondre à ma question et cessez de vous défiler. A moins que vous me cachiez quelque chose ?

— Insinuez-vous que je serais coupable de la disparition de Mathieu Kahn ?

— Je n’insinue rien du tout. Répondez simplement à ma question et tout se passera bien.

— Très bien. Je vous écoute.

— Mathieu prenait-il un traitement ? Et si oui, quelles en seraient les conséquences s’il était amené à pas le prendre ?

— Il avait des cachets à prendre pour éviter des douleurs. Et si cela ne suffisait pas, je devais lui faire une piqure, mais ça je vous l’ai déjà dit.

— Oui je m’en souviens. Et que se passerait-il si vous ne lui administriez pas cette fameuse piqure ?

— Je n’en ai aucune idée. Cela ne s’est encore jamais produit, je ne peux donc pas vous répondre avec certitude mais une chose est sure : il serait en train de souffrir atrocement à l’heure qu’il ait si cela s’était produit.

— Bien je vous remercie. Je vous laisse retourner à vos occupations. 

 

 

 

DEPOSITION DE JULIEN GIOVANNI – VENDEUR A L’EPICERIE ROSTANG

 

— Comment vous savez qu’il avait des dettes et vous devait-il de l’argent ?

— J’ai appris pour ses dettes grâce à lui. Il me disait quand il perdait de grosses sommes. Un jour il m’avait dit qu’en une partie il avait perdu plus de 1500€. Je trouvais ça énorme. Il était vraiment dans la galère. Donc dans un élan de sympathie, je lui avançais certaines courses qu’il ne pouvait pas se payer. Pour répondre à votre question, monsieur Lacan : oui, il me devait de l’argent et ce depuis maintenant plusieurs semaines. À force, ça commençait à être dur pour moi aussi. Ça finissait par empiéter sur ma vie. Je devais mettre un terme à toute mes activités, c’était vraiment pénible. Je manquais d’argent pour avoir été gentil avec quelqu’un qui ne faisait que perdre aux jeux. Mais je m’inquiétais pour lui tout de même. Il ne faut pas croire que je suis un monstre sans cœur.

— Pourquoi parlez-vous de Mathieu au passé ?

— Je … je parle de lui au passé ? Je n’avais pas remarqué. Je parle de lui comme ça car, euh, car il n’est plus là, je ne l’ai pas vu depuis longtemps. Je pense que quelqu’un qu’on ne voit pas, on peut parler de lui au passé. Mais il est mort, non ? Donc pourquoi cette question ?

            — Mort ? Certainement pas. En tout cas, nous n’avons pas retrouvé de corps, je vous le rappelle.

— Oh ! Excusez-moi je croyais que vous l’aviez trouvé.

— Avez-vous connaissance de problème de drogue ?

— Je le sentais un peu à bout ces dernières semaines. Je le soupçonnais de prendre de l’héroïne. Mon frère en prenait et il était devenu comme Mathieu. Mathieu aurait alors une autre raison de plus d’avoir besoin d’argent. Je pense qu’il se droguait pour oublier ses défaites, ses dettes ou les disputes qu’il avait avec sa femme, ça ne m’étonnerait pas de lui comme je vous l’ai dit précédemment il avait commencé a fumé récemment.

 

 

DÉPOSITION DE NICOLAS KAHN – FRÈRE DE MATHIEU (MINEUR)

 

            — À qui en voulez-vous le plus ? À votre frère ou à votre mère ?

— Humm, je pense que j’en veux surtout à ma mère. Mon frère, lui, n’y pouvait rien à ce qu’elle soit toujours sur son dos. Je ne suis d’ailleurs pas en bon terme avec ma mère et puis de toute façon elle n’est presque jamais là. Bon ok, j’avoue j’en ai longtemps voulu à Mathieu aussi, et c’est aussi à cause de ça que notre relation est devenue compliquée, mais jamais je ne lui aurais fait de mal. D’ailleurs, maintenant que j’y pense, l’autre jour il est venu me voir pour essayer de renouer, alors que ça fait au moins 6 mois qu’on ne se parle pas. Sur le moment, j’ai trouvé ça bizarre, mais je l’ai écouté et finalement je l’ai renvoyé bouler : son petit numéro, je le connais, il allait à coup sûr me demander de lui prêter de l’argent, me raconter ses problèmes ou je ne sais quoi d’autre.

            — Il doit de l’argent ?

— Évidemment ! A commencer par moi d’ailleurs. Je lui ai prêté 200 euros l’été dernier pour l’aider à faire une surprise à sa femme. A part ça, Mathieu doit de l’argent à un bon paquet de gens, à peu près tous les gens qu’il côtoie dans son entourage en fait. Tenez, vous n’avez qu’à demander à son collègue Marc, ou au mec de l’épicerie dans la rue où il habite. Quand j’y suis allé pour faire des courses, dès qu’il a vu mon nom sur la carte de fidélité, il m’a pris par le col et il m’a dit de dire à Mathieu qu’il devait passer pour lui rendre son fric, et que s’il le faisait pas ça allait mal se passer. Mais bon, Mathieu est réglo, je pense qu’il lui a rendu depuis. Donc bon, pas de quoi s’inquiéter de ce gars-là à mon avis.

            — Est-ce que vous savez que votre frère se drogue ?

— Comme je vous l’ai déjà dit, je ne connais presque rien de sa vie. Donc non, je ne savais pas. Mais ça m’étonne beaucoup de lui, vous en êtes sûr ? Mathieu n’est pas le genre de garçon qui se drogue, ce serait même plutôt celui qui dénonce les drogués, et qui les traîne en désintox. Après tout, il a certainement beaucoup changé depuis qu’il ne vit plus ici et ses fréquentations aussi j’imagine...

 

 

FIN DU 2ème ÉPISODE

 

avec :

 

Le Dr Manon Riault – Ellyn Sarbach

Julien Giovanni – Marius Verguin

Nicolas Kahn – Alix Benhamou

 

 


ÉPISODE 3: FINAL

 

Mathieu Kahn a disparu et personne, ni son médecin,

ni son frère, ni l’épicier du coin de la rue qui prétend être son ami

ne savent où il est.

Au commissariat, les interrogatoires

des deux principaux témoins se poursuivent,

quand soudain…

 

 


 

 

 

DR MANON RIAULT

 

Pour la deuxième fois en moins de quelques heures, je me retrouve encore sur cette même chaise toute bancale. J’ai reçu un message de ce chère Mr Lacan il y a deux heures me demandant de venir au commissaire aussi vite que je le pouvais car il avait une dernière question à me poser. J’ai été plutôt étonnée de voir ce message, je pensais qu’après notre échange d’hier il n’avait plus rien à me dire. Je me demande ce qu’il a bien pu découvrir cette fois parce que toute cette histoire commence vraiment à m’inquiéter. Je l’aimais bien moi ce jeune Mathieu.

— Bien. Comme je sens que cette enquête touche, bientôt à sa fin ; j’aimerais vous poser une dernière question, Dr Riault.

— Je vous écoute.

— Êtes-vous responsable de la disparition de Mathieu Khane ?

Alors ça, si je m’attendais à cette question. Enfin bon, s’il me la pose c’est qu’il doit vraiment avoir une idée précise du coupable. Ce n’est pas trop tôt, je commence vraiment à en avoir marre d’être déranger tous les deux jours.

— Manon Riault ? Vous m’entendez toujours ?

— Oui, oui, pardon, excusez-moi.

— J’attends votre réponse.

— Et je vais vous la donner.

Je m’avançai pour prendre appui avec mes coudes sur la table devant moi, et dit en détachant bien chaque mot :

— Je ne suis pas responsable de la disparition de mon patient Mathieu Kahn. A quoi cela m’avancerait sérieusement ? Si je le faisais disparaitre, je perdrais une de mes principales sources de revenue. Il est très dépendant de moi, dois-je vous le rappeler ? À moins d’un problème majeur, comme sa disparition par exemple, je sais que je pourrais toujours compter sur lui pour me permettre de payer mon loyer.

Un silence pesant se fit alors de l’autre côté des haut-parleurs puis il fut rompu par ses paroles :

— Je vous remercie de votre déposition et de votre collaboration docteur Riault, vous pouvez partir. La prochaine fois que je vous vois, je vous donnerais le nom de notre coupable.

— Je l’espère bien, bonne journée Mr le commissaire, et bonne chance si vous en avez encore besoin.         

 

DEPOSITION DE JULIEN GIOVANNI – VENDEUR A L’EPICERIE ROSTANG

 

— Êtes-vous responsable de la disparition de Mathieu Kahn, Monsieur Giovanni ?

— Non. Évidement je ne suis pas responsable de la disparition de Mathieu. Comme je vous l’ai dit : il était mon ami. Je suis triste de sa disparition, il était vraiment sympa comme gars. Et en plus votre question est un peu bizarre : quelqu’un qui est réellement le fautif ne va pas se dénoncer, c’est évident ! Il essaiera de contourner le sujet en faisant des remarques ou des longues tirades qui ne veulent rien dire et qui sont juste là pour le dédouaner. Moi je pense que vous vous trompez en me soupçonnant. Mathieu était mon ami, jamais je ne lui aurais fait quoi que ce soit, malgré les histoires d’argent. Je ne vois vraiment pas en quoi je suis suspect.

 

DÉPOSITION DE NICOLAS KAHN – FRÈRE DE MATHIEU (MINEUR)

 

— Avez-vous une part de responsabilité dans la disparition de Mathieu Kahn, Nicolas ?

         — Non. Je vous le répète, je n’aurais jamais fait de mal à Mathieu, c’est mon frère. Par contre, s’il est parti de lui-même, c’est peut-être de ma faute… Peut-être que la façon dont je l’ai rejeté l’autre jour l’a blessé ? Ou alors peut être que je ne l’ai pas assez soutenu pendant ses périodes sombres ? J’aurai peut-être dû être plus attentif à lui, à sa vie…Bref, je n’en sais rien, mais en tout cas je ne lui ai rien fait du tout.

         — Vous êtes pourtant la dernière personne qui a cherché à le joindre selon les relevés téléphoniques.

— C’est vrai… Je lui ai donné rendez-vous car je m’en voulais pour la dernière fois, je n’avais pas été sympa et ça ne me ressemblait pas. Nous avions convenu de se retrouver à 22h, dans le hall de l’immeuble pour ne pas réveiller notre mère. Je l’ai attendu, jusqu’à 23h, mais il ne s’est jamais pointé. Je lui en ai voulu, j’essayais de faire des efforts, et lui ne prenait même pas la peine de venir. Je l’ai appelé au moins 5 fois ce soir-là mais il n’a répondu à aucun de mes appels. J’étais énervé, alors je ne me suis pas dit qu’il lui était peut-être arrivé quelque chose. J’aurai dû, on en serait peut-être pas là aujourd’hui. J’espère qu’il ne lui est rien arrivé de grave...

* *

         Au cours des entretiens, un téléphone sonne avec insistance quelque part dans le commissariat. Personne ne décroche. Jusqu’à ce qu’enfin…

C’est le branlebas de combat au commissariat. Tout le monde est sous tension. La police vient de recevoir un appelle de Mathieu Khane, mais maintenant il faut le localiser. Cela fait maintenant dix minutes que tous les yeux sont rivés sur l’écran de l’agent Philippe Mirion, le spécialiste chargé de cette importante mission. Puis soudain, une adresse apparaît « 22 rue Montesquieu ».

— Oh bordel, t’as réussi Philippe ! t’as réussi ! s’exclama le commissaire Lacan, personne ne panique, vous allez tous m’écouter : Philippe toi tu bouges pas d’un poil et tu restes en communication avec moi pour me prévenir si ça bouge ; je veux les agents Dupond, Leroux, Mulet, Pelletier et Moreau avec moi on part retrouver le disparu. Briand, toi, t’appelles les pompiers et tu nous les envoie, et Dupuy tu te charges de nous préparer du renfort : on sait pas ce qui nous attend. Maintenant que tous le monde a ses ordres c’est parti les gars, on va le ramener ce Mathieu Khane !

Comme l’avait demandé le commissaire, les cinq agents et lui se retrouvèrent alors dans une voiture fonçant à tout allure direction le 22 rue Montesquieu. Arrivés à destination, il n’y avait personne dans les environs mais ils découvrirent une cave fermer à double tour. Heureusement, il en faut bien plus pour arrêter les policiers. Au moment où la porte céda sous les coup d’un bélier qui se trouvait dans le coffre de la voiture, les pompiers et les renforts débarquèrent. En entrant dans la cave, ils n’eurent aucune mauvaise surprise. Après quelques instants, on repérât Mathieu Kahn, recroquevillé dans un coin, le téléphone qui avait permis de le retrouver à côté de lui. Il était totalement inconscient, couvert de blessures, mais bien vivant. Au moment où les pompiers le chargèrent dans une civière, il reprit conscience. Le commissaire lui dit alors :

— Bonjour Mathieu, je suis le commissaire Lacan. C’est moi qui étais chargé de te retrouver. Je suis désolé d’avoir mis autant de temps. Comme tu es blessé, les pompiers t’amènent à l’hôpital. Est-ce que tu as quelque chose à me dire ?

— Oui, enfin je crois. Pendant que je vous attendais, la mémoire m’ai revenue et je me souviens de ce qui c passé, je me souviens de cette voix qui me criait dessus pendant qu’elle me frappait.

— Et c’était la voix de qui ?

— De Julien Giovanni, mon épicier.   

 

FIN DE LA DEPOSITION DE JULIEN GIOVANNI

 

— Vous avez une explication à nous donner ?

         Bon, oui, c’est vrai j’avoue, ça ne sert plus à rien de le nier. Vous allez le savoir un moment ou un autre. Je vais tous vous raconter. Alors : ça a commencé avec juste des disputes à propos d’argent pour qu’il se paye sa drogue. Ça m’avait énervé de tout le temps devoir lui donner des sommes énormes. En plus, c’était aggravé avec ce qu’il perdait au poker et dans d’autres jeux d’argent. Tout ça c’est envenimé il y a quelques jours, et nous nous sommes battus. Enfin, JE l’ai battu étant donné sa maladie qui lui empêche de voir. J’avais demandé à mes cousins de l’embarquer après son passage mensuel à l’hôpital. Puis après cette bagarre, je leurs ai demandé de le cacher dans cette cave. Je me rends compte aujourd’hui que j’ai été un véritable monstre. Je regrette vraiment. Mais, je commençais à emprunter de l’argent à toute ma famille. Je ne m’en remettrais surement jamais. Tout ça à cause d’une simple histoire de fric qui a mal tourné.

 

 

FIN

 

avec :

 

Le Dr Manon Riault et narration – Ellyn Sarbach

Julien Giovanni – Marius Verguin

Nicolas Kahn – Alix Benhamou

 

 

 

BONUS TRACKS

 

Oui, tout le monde se demande encore comment ce pauvre Mathieu Kahn a bien pu trouver le téléphone portable qui lui a sauvé la vie.

Voici trois propositions avancées par nos trois auteurs :

 

Ellyn Sarbach :

« Pour trouver le téléphone, Mathieu a eu beaucoup de chance. Étant donné qu’il est aveugle, il ne pouvait ni voir où il se trouvait, ni voir ce qu’il y avait autour de lui, et comme il était très mal en point, il avait du mal à se déplacer. Il était donc immobile. Mais bon, à quoi cela lui servait de bouger puisque de toutes façons, il ne pouvait rien voir. Mais au bout d’un certain, ses yeux ont commencé à lui faire mal. Au début ce n’était presque rien, mais plus le temps passait plus la douleur augmentait. Il y eu un moment où ses yeux lui faisaient tellement mal qu’il se mit à hurler de douleur. Alerter par ce bruit, Julien vint voir ce qui se passait. Quand il débarqua dans la cave et qu’il découvrit son ami, Mathieu Kahn, en train de se tordre de douleur et couvert de sang, son premier réflexe fut d’appeler une ambulance mais avant de se rendre compte de ce qu’il faisait, une voix répondit de l’autre côté du fil. Prenant alors conscience de ce qu’il faisait il jeta son téléphone avec violence et parti en courant. C’est comme ça que Mathieu pu joindre la police. »        

 

Marius Verguin :

« Le téléphone était là car la cave était un entrepôt de matériel informatique jeté, il y avait plein de téléphone que Mathieu a essayé pour au final, au bout de 10 minutes, trouver celui-là, avec un chargeur et une prise qui ne marchait pas vraiment et c’est comme ça qu’il a pu appeler la police. »

 

Alix Benhamou :

« Lorsque les cousins de Julien l’ont déposé dans la cave, un des deux a fait tomber son portable, dans la précipitation. Il ne s’en est même pas rendu compte, puisqu’il pensait l’avoir oublié chez lui. Heureusement pour Mathieu, la femme de ce gros idiot a vu qu’il partait sans, et l’a glissé à l’intérieur de sa poche juste avant qu’il passe la porte d’entrée. Lorsqu’elle a voulu l’appeler pour savoir s’il mangeait au boulot ou pas, Mathieu trouva le téléphone. Sans le savoir, elle a sauvé la vie de Mathieu Kahn... »